La transformation numérique de l’économie va-t-elle créer une crise sociale ?

La transformation numérique de l’économie va-t-elle créer une crise sociale ?

Vascoo-UP

1/6 : Les créations d’emplois seront-elles aussi nombreuses que les destructions : le paradoxe de Solow ?

cit-schumpeter1Les effets de la transformation numérique de l’économie sur l’emploi sont souvent évoqués et rarement précisés. C’est un bouleversement majeur, il n’est pas raisonnable d’en évacuer les conséquences sociales par une pirouette. Cette pirouette consiste le plus souvent à invoquer la destruction créatrice de Schumpeter censée justifier toutes les destructions d’emplois qui prépareraient un avenir radieux.

Cette destruction est très probablement créatrice mais les créations seront-elles aussi nombreuses que les destructions ?

Cette première question a une réponse précise grâce à une équation simple … à condition de connaître les paramètres. Les principaux paramètres pour connaitre le volume d’emplois disponibles et le taux de chômage sont :

  • Le taux de croissance économique
  • La durée du travail
  • L’évolution de la productivité
  • La croissance démographique

Si l’on estime ces paramètres en prenant l’Union Européenne comme espace de référence, on obtient les valeurs suivantes pour les prévisions à moyen terme (source Eurostat, banque de France, …) :

  • 1,9% de croissance économique
  • Une baisse de 2,5% de la durée du travail
  • 1,5% de progression de la productivité
  • 2,2% croissance de la population active disponible

Sur ces bases le taux d’emploi a théoriquement augmenté de 0,7% en 2015.
La valeur réelle constatée en 2014 est de +0,9% passant de 69,2% à 70,1%.

Le calcul comme les faits ne semblent pas montrer de dégradation de l’emploi. Les tenants de la destruction créatrice pourraient avoir raison et le pessimisme ne pas être de mise.

8297615-129871771Ceci repose toutefois sur l’hypothèse du maintien du paradoxe de Solow. En 1987 Robert Solow reçoit le prix Nobel et s’étonne de « voir des ordinateurs partout, sauf dans les chiffres de la productivité ». En effet, les Etats Unis, pays le plus avancé dans l’usage des technologies, conservait une productivité horaire médiocre.

Le paradoxe de Solow existe bien mais seulement au départ de la mise en œuvre des technologies. Il ne s’applique que pendant une période où :

  • Les délais de mise en œuvre ne permettent pas encore aux gains de productivité de compenser la perturbation générée par les évolutions
  • La part du stock net global de capital représentée par ces technologies est encore faible
  • Les ajustements d’effectifs n’ont pas encore été effectués

Nous sommes dans cette situation en matière de transformation numérique.

La question est donc quand le paradoxe de Solow va-t-il cesser de s’appliquer ? Si l’on compare l’évolution actuelle à l’impact de ce que nous avons appelé les NTIC dans les année 1990 et 2000, le décalage est de l’ordre de 10 ans entre le début de la phase des innovateurs et la fin du paradoxe de Solow. On pourrait donc attendre un impact fort de la transformation numérique sur l’emploi à partir de 2022-2024 (ceci n’est pas une prévision mais une estimation fondée sur une comparaison imparfaite et non pas sur un calcul).

Si c’est le cas, les gains de productivité moyens seront importants mais très variables en fonction des secteurs.

L’impact sur l’emploi dépendra essentiellement de la croissance générée par la transformation numérique, celle-ci étant elle-même conditionnée par les politiques publiques à un niveau macro-économique et plus encore l’esprit entrepreneurial appliqué à un niveau micro-économique.

Cet impact et cet avenir seront ce que nous en ferons !

Il n’est donc pas raisonnable de ne pas anticiper les impacts de la transformation numérique de l’économie sur l’emploi pour trois raisons essentielles :

  • Cet impact peut être globalement important
  • Même s’il était faible globalement il sera fort dans certains secteurs
  • Le plus important, nous pouvons agir en utilisant le levier de la croissance

L’anticipation et les solutions macro-économiques relèvent de la politique. Au niveau de l’entreprise elles dépendent des choix des directions. Pour que la déferlante numérique ne soit pas un facteur de crise sociale il est indispensable d’anticiper les transformations et d’avoir une réelle vision du futur. Il n’est plus possible de se contenter de gérer, il est nécessaire de transformer.

Les entreprises dont la direction saura s’appuyer sur les opportunités offertes par la transformation numérique préserveront l’emploi ou en créeront. Les autres …

Pierre François
P-DG Vascoo UP
Linkedin

Cet article ne traite que du volume d’emploi. Cinq prochains articles aborderont les thèmes suivants :

Une seconde série d’articles traitera des solutions à mettre en œuvre.

Les avis, contributions, corrections sont les bienvenus. Si ce sujet vous intéresse et que vous souhaitez que nous organisions une table ronde sur le sujet vous pouvez nous le faire savoir. Si vous êtes assez nombreux dans ce cas, nous vous proposerons d’organiser cet événement et vous serez consulté pour élaborer son contenu.